Coincée au milieu d'un de tes romans,
Repose une marguerite séchée ;
Une fleur offerte au bon vieux temps,
Où ce genre de gestes te touchait.
Je me rappelle l'avoir un jour cueillie,
Pour te l'offrir à la sortie des cours ;
Tu était la plus tendre, la plus jolie,
Parmi les filles de notre faubourg.
Vingt ans après et quelques ecchymoses,
Ont suffi pour freiner tous nos élans,
Et faire du beau bouton une triste rose
Brassée pour amortir les coups du temps.
La fleur séchée à la main, je tremble
Face au constat de l'état de nos lieux,
Et de notre vie, où rien ne ressemble
Aux rêves qu'on avait au fond des yeux.
Ému aux larmes, je la repose
A sa place et range le roman,
Comme si je voulais cette porte close
A jamais, sur ce pénible moment.