Est-ce bien moi, cette femme belle,
Que tu fis un jour tomber amoureuse?
Tu avais pourtant dit vivre pour elle,
Et tout faire pour la rendre heureuse...
Je t'ai, disais-tu, fait tourner la tête
Et fait battre ton coeur en porte-à-faux;
Que sans moi, ta joie était incomplète...
Que pour l'être aimé, rien n'est trop beau.
Je me retrouve, vingt années plus tard,
Peinant à trouver grâce à tes yeux
Et m'échinant seule du matin au soir,
Pour sauver notre couple sommeilleux!
Tu passes ton temps collé à la glace...
Je sais, le temps est une lourde croix,
Mais moi, je ne me voile pas la face,
Et je ne pars pas traquer d'autres proies.
Lorsqu'on arrive au crépuscule
De sa vie, retomber en enfance,
En plus de nous rendre ridicule,
Nous fait basculer dans l'indécence.
Tu te trouves encore assez vert
Pour aller butiner de fleur en fleur,
Infligeant à notre couple ce revers,
Après m'avoir arraché ma primeur?
Moi, celle qui, armée de patience,
T'a vu régresser au fil des années
Et t'a porté comme une pénitence,
Quand la raison dictait d'abandonner...
Moi, le témoin de tes frasques puériles
Et de tes volte-face de mâle blessé,
Lorsque tes assauts s'avèrent inutiles
Et tes salves des cartouches mouillées...
Tu vas, la dégaine de mâle viril,
Plastronner là où tu n'es pas connu,
Toujours en quête d'un look, d'un style,
Pour impressionner de pauvres ingénues.
Pendant ce temps là, moi, pauvre mère
De quelques ados et d'un vieil enfant,
Je n'ai fait que subir et me taire,
Dans l'espoir que tu retrouves la raison.
La coupe est pleine, aujourd'hui je m'en vais!
Quand un membre infecté fait trop mal,
Et qu'il commence à sentir mauvais,
L'amputer devient alors primordial!